Joumana Farah : vivre la recherche comme une aventure

Publié le 22/10/2025

Crédit photo : Franck Boisselier

Titulaire de la chaire de professeur junior Futur-xG de l’INSA Rennes, Joumana Farah a derrière elle une riche carrière de chercheuse et d’enseignante menée entre le Liban et la France. Cette spécialiste de l’optimisation des ressources des réseaux de télécoms vit son métier comme une aventure : « Aborder de nouveaux sujets, prendre des risques, oser, voilà ce qui me motive. » 


Après 20 ans de recherche et d’enseignement entre le Liban (son pays d’origine), Grenoble, Lille, Paris et Rennes, Joumana Farah a été recrutée fin 2022 par l’INSA Rennes, via le dispositif récemment créé de la chaire junior. « Je peux me consacrer prioritairement à la recherche, car mon service d’enseignement est réduit, explique l’intéressée. De plus, j’ai un budget pour acheter du matériel, financer des stagiaires et des doctorants ; et je peux monter des projets français ou internationaux avec d’autres équipes, activité que j’aime particulièrement. »


Objectif : plus de sobriété énergétique

Pourquoi Rennes ? « Pour la douceur du climat, la proximité de la mer et la qualité de vie ». Mais aussi parce qu’elle y a rejoint une équipe engagée sur des thèmes très proches des siens. « Mes collègues de l’IETR1 travaillent sur les antennes, le traitement du signal, les formes d’ondes, les communications numériques. Pour ma part, je cherche à réduire la consommation d’énergie des réseaux de télécoms. Nous sommes très complémentaires. D’ailleurs, nous avions des liens depuis plusieurs années. »

Les technologies numériques absorbent d’après le CNRS environ 10% de la demande mondiale d’électricité. Chaque nouvelle génération de télécoms (4G, 5G, 6G, etc.) offre plus de débit que la précédente. L’objectif de Joumana Farah : éviter que les consommations suivent cette tendance à la hausse, en optimisant la disposition des antennes, la distribution des fréquences et des puissances, etc.

« En combinant des outils comme l’algorithmie, les mathématiques, l’IA et la simulation, on peut facilement diviser par 10 la puissance consommée par les stations de base, ces équipements dont les antennes captent et relaient nos appels. Sans parler d’innovations comme les surfaces reconfigurables intelligentes, sortes de réflecteurs d’ondes qui améliorent leur propagation dans l’espace. »


Vers une graduate school internationale en télécoms à Rennes

En moins de deux ans à l’INSA Rennes, la chercheuse a publié six articles scientifiques, déposé avec des collègues d’IMT Atlantique un brevet sur les techniques d’accès dans les réseaux IoT, orchestré avec des collègues de l’IETR le démarrage de cinq thèses, pris la codirection d’un projet national au sein du PEPR « 5G et réseaux du futur » doté de plusieurs millions d’euros…

Elle prépare aussi avec des collègues de l’INSA Rennes, en copilotage avec l’Université de Rennes et dans le cadre du projet RIS32, l’ouverture d’ici deux à trois ans d’une graduate school internationale sur les réseaux télécoms. Elle sera destinée aux étudiants de master et de doctorat. En parallèle, Joumana Farah enseigne le traitement du signal et les télécoms aux élèves-ingénieurs. Ce qu’elle préfère : leur faire comprendre le lien entre ces sujets et leur quotidien. « Si leur smartphone a une bonne autonomie, si les vidéos qu’ils regardent ont des images de qualité, c’est parce que des scientifiques s’y consacrent. » 
 

Pas de recherche sans prise de risque

Son credo : « Vivre la recherche comme une aventure : la prise de risque, c’est la clef pour obtenir des résultats, publier, déposer des brevets. » Sa carrière atypique entre deux pays en témoigne ; comme le fait qu’elle n’a jamais interrompu ses travaux de recherche, même les années où elle gérait un département et enseignait à temps plein : « c’était ma bouffée d’oxygène ». Le goût du risque, c’est aussi le choix d’initier des sujets de recherche audacieux (tels que de nouveaux schémas d’accès multiple et de planification des réseaux), ou de donner leur chance à des doctorants sans se cantonner à leur seul niveau académique. « J’en encadre depuis 20 ans et clairement, c’est leur motivation qui fait la différence, bien plus que leurs notes passées. Accompagner ces jeunes, c’est croire en eux et entretenir cette motivation. »

1 Institut d’Électronique et des Technologies du numéRique – UMR CNRS 6164 – Centrale Supélec/CNRS/INSA Rennes/Université de Nantes/Université de Rennes
2 Réseaux intelligents, sécurisés, souverains et soutenables

Cet article est extrait du magazine "Inside Labs, la Recherche à l'INSA Rennes". Retrouvez l'intégralité du 5e numéro "Quand la science rencontre l'industrie. Les succès de la valorisation."

 

 

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